Présentation de la surveillance communautaire

Qu'est-ce que la surveillance communautaire ?

Dans le contexte de cette boîte à outils, la surveillance communautaire désigne la participation active des communautés de pêcheurs et de leurs représentants à l'identification, à la documentation et au signalement des activités de pêche INN et d'autres activités destructrices qui ont des répercussions sur leurs moyens de subsistance (cela comprend par exemple les dommages causés par des navires industriels aux navires de pêche locaux ou sur tout autre engin de pêche).

Quelles situations peuvent être détectées par les programmes de surveillance communautaire ?

Les programmes de surveillance communautaire peuvent être mis en œuvre afin de détecter toute une série de phénomènes, tels que la pêche illégale, les pratiques de pêche destructrices et la pollution. Dans le contexte de cette boîte à outils, l'objectif principal consiste à détecter et à signaler les cas de pêche illégale.

La pêche illégale peut revêtir de nombreuses formes et le caractère illégal des pratiques de pêche dépend des cadres juridiques et réglementaires qui régissent les activités dans une masse d'eau donnée. Certains de ces cadres sont souvent disponibles en ligne, notamment dans la base de données FAOLEX ou sur les sites web des autorités compétentes en matière de pêche (ministère de la pêche ou commission des pêches), et doivent être consultés si l'on veut déterminer clairement si des activités de pêche INN ont bien eu lieu.

La surveillance communautaire est particulièrement utile pour identifier les activités de pêche INN dans les cas où la pêche est interdite aux navires industriels dans certaines zones, en particulier lorsque ces zones interdites se superposent aux zones d'activité des pêcheurs artisanaux. Il s'agit par exemple des aires marines protégées (AMP) qui interdisent la pêche industrielle ou encore des zones d'exclusion côtières (ZEC). La surveillance communautaire peut également permettre de détecter d'autres formes de pêche INN ou de pratiques de pêche destructrices, telles que l'utilisation d'engins non conformes, les rejets de poissons en mer, l'enlèvement des nageoires de requin et l'endommagement de navires ou d'engins de pêche artisanale. En outre, la surveillance communautaire peut permettre de recueillir des éléments de preuve attestant de cas de pêche artisanale INN sur les plages où sont débarqués les poissons. Ces cas peuvent inclure la présence d'engins illégaux (lumières ou feux, explosifs, substances nocives, entre autres) ou de pêcheurs prenant la mer et/ou débarquant des captures au cours des périodes d'interdiction de la pêche.

Surveillance Center at Bureau of National Fisheries Monrovia

Dans quelles situations la surveillance communautaire peut-elle être pertinente ?

En raison de la nature diversifiée des activités de pêche INN et de la dynamique propre aux différentes pêcheries mondiales, la surveillance communautaire sera plus adaptée à certaines situations qu'à d'autres. Elle s'applique en particulier aux États côtiers :

  • Où la pêche INN (pratiquée par des navires industriels ou artisanaux) est considérée comme un problème majeur qui reste souvent non détecté et/ou impuni.

  • Où les pêcheurs artisanaux et les navires industriels opèrent dans les mêmes zones marines

  • Où l'on constate des capacités ou une volonté limitées de la part de l'État et/ou de la société civile de lutter efficacement contre les activités de pêche INN ou les pratiques de pêche destructrices

Où les membres des communautés ont signalé des dommages fréquents causés aux engins et aux navires de pêche artisanale (qui résultent souvent d'activités de pêche illégales menées par des navires industriels).

Quels avantages apporte la surveillance communautaire dans la lutte contre la pêche INN ?

La collecte de preuves solides attestant des activités de pêche INN peut s'avérer particulièrement difficile en raison de l'opacité et de la distance géographique qui caractérisent les activités de ce secteur. En outre, cette collecte peut nécessiter toute une série de ressources financières, technologiques et humaines qui peuvent ne pas être facilement disponibles dans les pays concernés. Par ailleurs, les méthodes conventionnelles de surveillance des acteurs non étatiques, telles que les plateformes publiques de suivi des navires, se heurtent à la capacité des navires industriels à « passer sous le radar » en éteignant leurs émetteurs satellites, ce qui leur permet de dissimuler leurs activités illégales.

Impliquer les pêcheurs artisanaux dans la collecte de ces preuves et les doter des outils nécessaires à cette fin permet de renforcer les capacités et de contrecarrer les navires « fantômes » (dark vessels), car cette communauté est particulièrement bien placée pour documenter les illégalités commises en mer. Les techniques de surveillance communautaire reposent souvent sur des technologies et des approches peu coûteuses et faciles d'accès, et sont donc bien adaptées aux pays du Sud à faible revenu, qui sont généralement touchés de manière disproportionnée par la pêche INN.

Bien que les recherches sur le sujet soient limitées, il est également concevable que les projets de surveillance communautaire puissent non seulement détecter les activités de pêche INN, mais aussi les décourager, en particulier lorsque ces projets font l'objet d'une large promotion aux niveaux local et national. Par exemple, la Guinée et la Sierra Leone ont constaté des réductions significatives des cas de pêche illégale résultant de la présence de projets de surveillance communautaire.

Quelles preuves doivent être recueillies pour une surveillance communautaire efficace ?

Si des poursuites administratives ou judiciaires doivent être engagées à l'encontre d'un navire, il est important que les pêcheurs sachent quelles sont les informations spécifiques qu’ils doivent s'efforcer de collecter, et ce afin de s'assurer que le dossier soit le plus solide possible. Ces informations comprennent :

  • Les informations sur l'identité du navire : Les pêcheurs doivent s'assurer que les photos ou les vidéos montrent le plus d'informations possible sur l'identité du navire, et notamment, le cas échéant, son nom, son indicatif d'appel radio et tout autre identifiant du navire (tels que ceux délivrés par l'Organisation maritime internationale, les numéros « OMI »). De plus amples informations sur ces identifiants sont disponibles dans la section « Ressources supplémentaires », et notamment dans le «Guide photographique pour le contrôle des pêches» de TMT et Stop Illegal Fishing.

  • Les données de localisation : L'enregistrement des coordonnées de la position du navire peut s'avérer utile, en particulier lorsqu'il est soupçonné de pêcher sans autorisation dans une zone interdite.

  • Les preuves attestant que le navire est en train de se livrer à des opérations de pêche : dans la plupart des cas, il est important que les preuves photographiques ou vidéo de la pêche INN montrent également que le navire est en train de pêcher activement, et non simplement en transit (c'est-à-dire qu'il se rend au port ou sur un autre lieu de pêche). Pour ce faire, les pêcheurs doivent essayer de montrer que les filets ou les engins de pêche du navire sont immergés dans l'eau, ou de capturer des photographies ou vidéos montrant que les poissons sont hissés à bord du bateau.

Afin de recueillir ces informations, les pêcheurs peuvent être amenés à s'approcher relativement près du navire en question. Toutefois, il est important qu'ils se tiennent à une distance de sécurité suffisante afin d'éviter tout risque de collision et de pouvoir partir en toute sécurité en cas d'hostilité.

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